GM Magnus Carlsen
Bio
Magnus Carlsen est l'actuel champion du monde d'échecs. Il est considéré par beaucoup comme le meilleur joueur de tous les temps, bien que Garry Kasparov et Bobby Fischer demeurent de sérieux concurrents à cette distinction dans le cœur des fans. Quoi qu'il en soit, il est indéniable que Carlsen s'est taillé une place au sommet de la hiérarchie avant même de fêter ses 30 ans.
La force des faits se suffit à elle-même. Le prodige norvégien annule Kasparov et bat Anatoly Karpov à seulement 13 ans, lors de la même épreuve, tout juste un mois avant de devenir le second GM le plus jeune de l'Histoire. En 2009, il fait tomber un record impressionnant, celui de précocité à franchir le seuil mythique des 2800.
Carlsen passe très vite du statut d'immense espoir à celui de joueur de classe mondiale. Il poursuit son ascension en s'emparant de la tête du classement élo en 2011 et ne cesse depuis lors de renforcer son rang de numéro un mondial. Le titre de champion du monde arrive comme une évidence dans sa carrière et sa défense bien que parfois compliquée s'est déjà perpétuée à trois reprises. Il a également remporté plusieurs couronnes mondiales en rapide (deux fois) et en blitz (quatre fois), obtenu le meilleur classement de l'Histoire et signé une cascade de victoires dans les top tournois dont deux dans son fief norvégien (Norway Chess) et pas moins de sept à Wijk Aan Zee !
Le plus incroyable dans cette domination sans partage est qu'elle semble partie pour durer encore de nombreuses années dans une ère pourtant plus compétitive que jamais ! La légende de Carlsen continue de s'écrire chaque jour et nul ne sait jusqu'à quels records, elle le mènera.
- Jeunesse (1995 à 2004)
- Deuxième GM le plus précoce de l'Histoire (2004 à 2009)
- Plus jeune joueur à atteindre 2800 (2009 à 2013)
- 16ème champion du monde incontesté (2013)
- Record élo à 2882 et titres mondiaux dans toutes les cadences (2014 to 2019)
- Présent et futur
Jeunesse (1995 à 2004)
Carlsen apprend à jouer aux échecs à l'âge de cinq ans mais ne montre dans un premier temps que peu d'intérêt pour le jeu des rois. Il impressionne cependant son entourage en montrant des aptitudes intellectuelles hors-normes dans toutes sortes d'activités.
À deux ans, le petit Magnus est déjà capable de résoudre des puzzles de 50 pièces et s'amuse avec des légos destinés aux enfants de 10 à 14 ans. Quand Henrik Carlsen, son père, l'initie aux échecs, l'enfant de cinq ans est trop occupé à mémoriser les régions, le nombre d'habitants, les drapeaux et les capitales de chaque pays du monde. Plus tard, Carlsen réalise une tâche similaire en apprenant par cœur les régions, le nombre d'habitants, les blasons et les centres administratifs de presque toutes les municipalités norvégiennes (il en existe aujourd'hui 422).
La mémoire impressionnante du futur champion du monde constitue évidement un atout de taille dans son apprentissage et sa progression aux échecs. Au début, il a pour simple objectif de battre sa sœur aînée mais très vite il se met à rejouer des parties que lui montre son père, s'entraîne à trouver des combinaisons en jouant contre lui-même et dévore des livres d'échecs. Son premier ouvrage s'intitule Find the Plan (Trouvez le plan) de Bent Larsen, le sextuple champion du Danemark et le joueur scandinave le plus fort de l'Histoire - avant que son lecteur ne le dépasse.
Au début de sa carrière, Carlsen est entraîné par le meilleur joueur norvégien, le septuple champion national Simen Agdestein qui, associé à l'ancien champion junior norvégien Torbjorn Ringdal Hansen, l'aide à faire éclore son immense talent. En un an (2000) seulement, son élo effectue un bon prodigieux de plus de 1000 (!) points, passant de 904 à 1907.
Il faut peu de temps à Carlsen pour signer des performances impressionnantes et remporter ses premiers tournois. En juillet 2000, le garçon de neuf ans est sacré champion national des moins de 11 ans avec un score de 10/11. Après quoi, il enchaîne les performances autour de 1900 élo dans les événements auxquels il prend part.
Puis, selon Carlsen et sa famille, intervient un tournant lors du championnat de Norvège par équipes juniors en septembre 2000. Magnus marque 3,5 points sur 5 contre les meilleurs joueurs du pays alors qu'il n'a pas encore soufflé ses dix bougies, sa performance dépasse alors les 2000 élo pour la première fois.
En 2002, Carlsen poursuit sa trajectoire ascendante. Il se classe d'abord sixième dans la section des moins de 12 ans du Championnat d'Europe avant de partager quelques semaines plus tard la première place du Championnat du Monde de cette même catégorie d'âge. Il s'incline cependant en départages contre... Ian Nepomniachtchi qui, des années plus tard, deviendrait occasionnellement son secondant et l'un des meilleurs joueurs du monde.
L'année d'après, Carlsen termine dans le top 10 des deux mêmes tournois (Championnat d'Europe et Championnat du Monde des jeunes) chez les moins de 14 ans. Il réalise cette année-là trois normes de MI à l'âge de 12 ans et obtient officiellement son titre en août 2003.
Deuxième GM le plus précoce de l'Histoire (2004 à 2009)
Le phénomène norvégien se fait connaître sur la scène internationale grâce à une année 2004 riche en succès. Carlsen commence par remporter le groupe C du tournoi d'élite Corus à Wijk aan Zee avec le score impressionnant de 10,5/13 et une performance stratosphérique à 2702 ! Il signe ainsi sa première norme de GMI, fait la une des journaux spécialisés et se fait sponsoriser par Microsoft qui flaire la pépite à l'état brut.
Après avoir aisément obtenu sa seconde norme de GMI un mois plus tard, Carlsen participe à un prestigieux tournoi de blitz en Islande. Il y bat Karpov, l'ancien champion du monde - souvent considéré comme l'un des 10 meilleurs joueurs de tous les temps. Le lendemain, dans l'épreuve rapide à élimination directe, il fait face, du haut de ses treize ans, à Garry Kasparov, alors numéro un mondial et légende vivante du jeu.
L'Ogre de Bakou peut s'estimer heureux de s'en sortir par la nulle dans la première partie dominée par Carlsen qui, sous pression au temps, ne peut convertir son avantage. Le jeune prodige s'incline ensuite dans la revanche mais ses deux batailles livrées contre deux des meilleurs joueurs de l'Histoire sont grandement médiatisées.
Le mois suivant, en avril, Carlsen complète sa dernière norme de GMI à 13 ans, 4 mois et 27 jours, ce qui fait de lui le second plus jeune grand maître de l'Histoire (après Sergey Karjakin qui détient toujours le record à exactement 12 ans et 7 mois).
Carlsen prend part au Championnat de Norvège en 2004 et partage la première place avec le tenant du titre, Berge Ostenstad. Un match de deux parties est organisé pour décider du vainqueur mais les deux nulles permettent au champion de conserver son titre grâce à un meilleur départage dans le tournoi. L'année suivante, Carlsen tente de nouveau sa chance et se retrouve encore premier ex-equo, cette fois-ci avec son mentor, Agdestein.
Cependant, un changement de règlement stipule que le titre ne peut être attribué selon le départage du tournoi (qui était en faveur de Carlsen ce coup-ci), aussi des parties rapides sont organisées jusqu'à ce qu'un clair vainqueur se dessine et c'est le maître qui finit par dominer l'élève dans leur 6ème joute. Carlsen remporte finalement son premier champion national l'année suivante, en 2006, pour ce qui sera - à l'heure actuelle - sa dernière participation.
Auparavant en 2005, Carlsen s'empare de la première place du Mémorial Arnold Eikrem avec 8/9 points. Le prodige de 14 ans termine avec un point d'avance sur des GMs plus expérimentés et est l'auteur d'une performance remarquable à 2792. En fin d'année 2005, Carlsen se classe 10e à la Coupe du Monde FIDE, devenant ainsi le plus jeune joueur à se qualifier (à 15 ans) pour le tournoi des candidats. Au premier tour de cet événement en 2007, il rencontre Levon Aronian, tête de série numéro 1 et parvient à le tenir en échec à l'issue de leurs 6 parties classiques avant de s'incliner au départage en rapides.
En 2006, Carlsen s'impose au tournoi de Bosnie-Sarajevo, disputé au format double rondes avec une moyenne élo de 2659. Magnus, alors âgé de 15 ans, s'en sort avec une performance à 2696. Il brille au tournoi de blitz de Glitnir cette année-là en balayant Viswanathan Anand et Hannes Stefansson en demi-finale et en finale sur le score de 2-0. Lors des 37èmes Olympiades d'échecs, il marque 6 points sur 8, soit la 5ème meilleure performance du tournoi, qui comporte pourtant 13 joueurs à plus de 2700 et 42 GMs mieux classés que lui.
Carlsen participe de nouveau au tournoi des Grands Maîtres de Bienne en 2007 après avoir terminé à la dernière place en 2005 et à la deuxième en 2006. Cette fois-ci, le norvégien monte encore d'un cran et signe son premier succès dans un tournoi de catégorie 18 (moyenne élo entre 2676 à 2700). Il considère alors ce succès comme le plus important de sa jeune carrière puisqu'il devance un groupe de quatre membres du top 25 mondial - Teimour Radjabov (9), Alexander Grischuk (14), Judit Polgar (19) et Bu Xiangzhi (25) - avec 6/10 points et une performance à 2753.
Au début de l'année 2008, Carlsen est pour la première fois l'auteur de perfs à plus de 2800. D'abord dans le groupe A du top tournoi de Wijk aan Zee où dire que l'adversité est élevée est un doux euphémisme. Onze des quatorze participants sont classés parmi les 16 meilleurs mondiaux et tous sauf deux ont un élo d'au moins 2700. Carlsen, à 17 ans, partage la première place avec Aronian malgré son statut initial de tête de série numéro 10.
Vient ensuite une nouvelle performance exceptionnelle au tournoi de Linarès, regroupant seulement huit joueurs, tous classés dans le top 13 mondial - Carlsen étant le dernier. Il termine invaincu, avec le score de 8/14 ce qui lui vaut la deuxième place derrière le champion du monde de l'époque, Anand. Autre fait saillant de cette année-là est la victoire de Carlsen au tournoi Aerosvit, où il finit encore une fois invaincu avec 8/11 points et réalise une performance à 2877, soit la meilleure de sa carrière.
Plus jeune joueur à atteindre 2800 (2009 à 2013)
À cheval sur septembre et octobre 2009, Carlsen impressionne au tournoi Pearl Spring Chess, fermé à double à rondes, comportant six super-grands maîtres. Avec 8/10 points, il écrase la concurrence et Veselin Topalov - numéro un mondial de l'époque - est relégué à 2,5 points. Le plus "tape-à-l,œil" dans cet événement est la performance stratosphérique de Carlsen, accrochez-vous : 3001. C'est la quatrième meilleure de l'Histoire en tournoi depuis la création du système de classement élo en 1970. Selon le spécialiste des stats échiquéennes, Jeff Sonas, il s'agit de l'un des 20 plus grand prodiges réalisés par un joueur et le plus extraordinaire de la part d'un adolescent.
Le génie norvégien de 18 ans, classé 2772, voit son élo grimper de 29 points grâce à cette éclatante victoire à Pearl Spring ce qui lui permet de dépasser la barre mythique des 2800 d'un point ! Il devient alors le cinquième joueur de l'histoire à franchir ce pallier et demeure le plus jeune à avoir réalisé pareil exploit.
En novembre, Carlsen remporte le Championnat du Monde de blitz. avec le score de 31/42, soit trois points de plus que le champion du monde classique du moment, Anand, lui-même trois points devant un autre champion du monde, Vladimir Kramnik (qui partage la troisième place avec Karjakin). Le tournoi est un marathon à double rondes de 22 joueurs, au classement élo moyen de 2718. Carlsen, à peine deux semaines avant son 19e anniversaire, est donc sacré champion du monde de blitz avec une performance à 2894.
La remarquable année 2009 de Carlsen se conclut par le London Chess Classic, un tournoi sur invitation réservé à l'élite mondiale, qui cette année-là sera le théâtre de l'essai d'un nouveau système de points : trois pour une victoire, un pour une nulle et zéro en cas de défaite. Le numéro un mondial s'impose en totalisant un score de 13 points, soit 3 victoires - dont une contre le numéro 2 Kramnik - pour 7 nulles et aucune défaite.
Pour Carlsen, les années semblent se suivre et se ressembler et 2010 va s'avérer tout aussi fructueux. En janvier, il s'impose en solitaire au tournoi de Wijk aan Zee avec 8,5 points sur 13 face à une adversité au élo moyen de 2719, comprenant Kramnik, Alexei Shirov, Anand et Hikaru Nakamura. En juin, Carlsen domine le Bazna Kings qu'il finit invaincu avec 7,5/10, soit deux points d'avance sur Radjabov et Boris Gelfand, en plus d'une performance à 2918.
Après une troisième place ex-equo en janvier à Wijk aan Zee, Carlsen signe quelques grandes victoires en 2011. Il se défait de Karjakin en départage au Bazna Kings, puis domine confortablement le 44e Festival d'échecs de Bienne, où il marque 19/30 et devance Alexander Morozevich (17/30). Quelques mois plus tard, Carlsen bat Vassily Ivanchuk en blitz de départage pour s'adjuger le Grand Slam Chess. Sa dernière victoire en tournoi cette année-là se déroule en décembre au Mémorial Tal où il devance Aronian au départage.
Le point culminant de l'année pour Carlsen n'a pas été ses performances en tournoi, certes impressionnantes, mais sa reconquête de la première place mondiale au dépens d'Anand. En juillet 2011, il redépasse l'indien sur le publication de la FIDE et depuis lors personne n'a été en mesure de contester son hégémonie au classement (au moment de la publication, Carlsen a passé 112 mois en tant que numéro un mondial, ce qui le place pour l'instant dans l'Histoire juste derrière Kasparov).
L'année 2012 de Carlsen se révèle relativement faste. Il démarre par une seconde place en compagnie de Radjabov et Fabiano Caruana à Wijk aan Zee (Tata Steel 2012), derrière Aronian. Un nouveau rôle plutôt inhabituel de dauphin clôt son tournoi de Grands Maîtres de Bienne, cette fois derrière Wang Hao.
Tout rentre dans l'ordre et les succès reprennent leurs droits. Lors de la finale du Slam Chess, Carlsen se défait de Caruana 2-0 en blitz de départage, devançant ainsi le talentueux américain ainsi que Aronian, Anand et Karjakin. Finalement, en décembre, Carlsen finit, comme à son habitude, l'année en beauté par une troisième victoire au London Chess Classic qu'il domine devant des concurrents de haute volée tels que Kramnik, Michael Adams, Nakamura, Anand, Aronian et Polgar.
Cette consécration dans la capitale anglaise lui vaut de faire tomber le record élo (2851) de Kasparov, datant de 13 ans. En janvier 2013, Carlsen apparaît officiellement sur la liste de la FIDE avec le plus haut classement jamais atteint, un vertigineux 2861.
16ème champion du monde incontesté (2013)
Comme chaque année, Carlsen lance sa saison 2013 par le tournoi de Wijk aan Zee, qu'll remporte cette fois avec 10/13, égalant le record de points de Kasparov réalisé en 1999, Carlsen devance Aronian d'un point et demi. Le numéro un mondial doit par la suite se contenter de quelques secondes places au Norway Chess et au Mémorial Tal. En septembre, il rebondit en s'adjugeant la Sinquefield Cup devant Nakamura.
Un mois plus tard, Carlsen affronte le champion du monde de l'époque, Anand, pour le moment le plus important de sa carrière. Il a gagné ce droit en arrachant la victoire au tournoi des candidats en mars et avril, grâce à un meilleur départage que le numéro deux mondial de l'époque, Kramnik - parfait échauffement pour le match qui l'attend à Chennai, en Inde. Carlsen ,alors classé 2870, est grand favori face au tenant du titre, retombé au huitième rang mondial à près de 100 points élo de son challenger (2775).
Un round d'observation de quatre parties nulles lance le match avant que Carlsen ne prenne le dessus dans la cinquième manche. Carlsen opte avec les blancs pour le grand roque dans un Gambit Marshall. Fort de pièces plus actives et d'une meilleure structure de pions, il met la pression sur Anand qui rate un coup clé dans une finale de tours+fous (45.... Ta1) pour garder l'équilibre. Carlsen ne laisse pas passer sa chance et surfe sur son élan victorieux dès la partie suivante avec les noirs. Dans une finale de tours, il capitalise sur les erreurs du champion du monde et à mi-parcours, prend déjà le large sur le score de 4 à 2.
Les deux parties suivantes se révèlent relativement calmes, tandis que dans la septième du match, Carlsen défend avec ténacité avec les noirs dans une Défense Berlin de la Ruy Lopez. Dans la partie suivante, le norvégien surprend son rival en jouant 1. e4 pour la première fois, ce qui pousse Anand à réagir par la critiquée Défense de Berlin compte-tenu de la situation du match, des échanges massifs s'en suivent et une nouvelle nulle est conclue.
Pratiquement dos au mur, le tenant du titre promet plus de risques dans sa prochaine partie avec les blancs. Il choisit le système agressif (4. f3) contre la Nimzo-Indienne et une partie passionnante se dessine. Anand manque cependant des opportunités pour mener une attaquer plus tranchante alors que Carlsen fait preuve de toute la résilience qu'on lui connaît. Une gaffe tardive dans une tentative de jouer le tout pour le tout conduit Anand à la perte de la partie, scellant ainsi quasiment le sort du match. Il ne peut ensuite faire mieux que nulle avec les noirs et doit ainsi abandonner sa couronne à son jeune challenger, vainqueur sur le score de 6,5-3,5.
Ce titre de champion du monde arrive une semaine avant le 23ème anniversaire de Magnus Carlsen qui met fin au règne d'Anand, champion incontesté de 2007 à 2013, Carlsen devient par ce fait le 16e champion du monde de l'Histoire, cela vaut bien un petit plongeon tout habille dans la piscine !
Le jeu dynamique de Carlsen durant cet affrontement fait de ce match avec Anand une bataille mémorable. Chess.com le classe septième sur la liste des 10 Championnats du Monde les plus excitants de tous les temps.
Record élo à 2882 et titres mondiaux dans toutes les cadences (2014 à 2019)
Après avoir atteint l'accomplissement ultime et sans doute le plus important aux échecs, Carlsen est pourtant parvenu, d'une certaine façon, à mettre la barre encore plus haut l'année suivante. Il commence 2014 par gagner le Zurich Chess Challenge, nouveau tournoi le plus côté de l'Histoire avec une moyenne élo étourdissante à 2801. L'événement est le tout premier de catégorie 23 (2801 à 2825) à voir le jour. Un blitz de mise en bouche, remporté par Carlsen, détermine les appariements.
Vient donc l'heure des échecs classiques où Carlsen marque huit points, soit deux de plus que son premier poursuivant Aronian. Le norvégien termine seulement quatrième de la portion rapide qui suit mais cela demeure suffisant pour dominer l'événement dans sa globalité devant Caruana et Aronian, co-deuxièmes et les autres participants Nakamura, Anand et Gelfand.
Plus tard en avril, Carlsen gagne le tournoi de Shamkir avec 6,5/10 points au nez et à la barbe de Caruana, seul second. En mai 2014, Magnus rentre encore un peu plus dans l'Histoire des échecs en culminant sur la lise de la FIDE à 2882, record absolu qu'il tente encore d'améliorer aujourd'hui. Durant ce tournoi de Shamkir, Carlsen connaît même un pic virtuel à 2889.2, le 21 avril 2014, pour être précis.
Carlsen n'en a pas fini pour autant avec l'année 2014. En juin, les Championnats du Monde de rapides et blitz FIDE ont lieu à Dubaï. Carlsen marque 11/15 et s'empare de la couronne en rapide, un demi-point devant Caruana, Anand, Aronian et Morozevich. Deux jours plus tard, le numéro un mondial totalise 17 points sur 21 pour triompher au blitz - un point devant Nepomniachtchi et Nakamura, eux-même, détachés de deux points du peloton - et devient triple champion du monde dans les trois cadences.
Après cette exploit retentissant, Kasparov commente sur Twitter : "Carlsen est évidemment le plus fort, mais triompher aux 3 cadences, c'est un peu comme gagner au tennis sur terre battue, sur herbe et sur dur." Ces accomplissements majeurs étoufferaient presque l'événement prépondérant pour le norvégien, sa défense de son titre de champion du monde en classique contre Vishy Anand, vainqueur du tournoi des candidats et donc en droit de réclamer une revanche.
La première partie se solde par la nulle sur une Défense Grunfeld choisie par Carlsen avec les pièces noires. Il remporte ensuite sa partie avec les blancs sur une Ruy Lopez grâce à l'activité de ses pièce en finale. Anand créé cependant la surprise en revenant immédiatement à hauteur, il s'appuie sur une préparation très pointue dans un Gambit Dame refusé pour prendre le dessus pour la première fois sur Calrsen. Le tournant du match a lieu dans la sixième partie.
Après deux nulles, Anand rate une tactique évidente qui l'aurait mis sur le chemin de la victoire. Au lieu de profiter de la grossière erreur de Carlsen, il lui fait confiance et se trompe à son tour lourdement, ce qui lui coûtera la partie. Quatre autres nulles viennent ensuite conforter la position dans le match du champion en titre avant que, dos au mur, Anand tente son va tout dans la onzième partie. Le challenger parvient à compliquer la position en milieu de jeu mais cela ne suffit pas à perturber Carlsen qui finit même par prendre le dessus, s'assurant ainsi de conserver sa couronne.
Carlsen débute l'année suivante en remportant le Tata Steel de Wijk aan Zee, avec une seule défaite au compteur et 9/13 points, Il s'assure une marge d'un demi-point sur Maxime Vachier Lagrave, Anish Giri, Wesley So et Ding Liren, qui se partagent tous la deuxième place. Le mois suivant, Carlsen enchaîne par un nouveau succès au Grenke Classic où il domine Arkadij Naiditsch en départage. Le triple champion du monde échoue cependant dans les deux épreuves suivantes. Il déjoue totalement devant son public en Norvège, se classant septième tandis qu'il monte sur la seconde marche du podium de la Sinquefield Cup.
En octobre 2015, il est temps pour Carlsen de défendre ses titres mondiaux de rapide et blitz. Il réussit la première moitié de sa mission de manière convaincante, en asseyant sa domination en rapide avec un piont d'avance sur Leinier Dominguez Perez, Radjabov et Nepomniachtchi. Cette performance fait alors de Carlsen le joueur le mieux classé dans les trois cadences simultanément.
Toutefois, cet accomplissement n'est que temporaire, Magnus qui démarre la deuxième journée de blitz à égalité en tête avec Vachier-Lagrave, finit par s'écrouler et doit se contenter de la sixième place. L'heureux lauréat est Grischuk alors que Nakamura dépasse Carlsen (qui perd 35,6 points elo dans l'événement) au classement mondial de la spécialité.
La vague suivante de tournoi est en réalité une déferlante de victoire puisque Carlsen fait main basse sur plusieurs épreuves de haut niveau : le London Chess Classic et le Masters du Qatar en décembre 2015, son cinquième titre à Wijk aan Zee où il termine invaincu en janvier 2016, son premier titre au Norway Chess en avril, des succès dans les sections rapide et blitz (pour écraser le tournoi général) du Grand Chess Tour à Louvain, en juin et le Masters de Bilbao en juillet.
En octobre 2016, Carlsen triomphe aussi online lors du Championnat de Chess.com en battant Tigran Petrosian 21-4, Grischuk 16-8 et Nakamura 14.5-10.5 dans une finale qui bat tous les records d'audience et de connexions sur Chess.com.
La suite du programme de Carlsen est sa deuxième défense du titre de champion du monde où il fait cette fois face à Karjakin, vainqueur de la Coupe du Monde FIDE 2015 et bourreau de Caruana au tournoi des candidats 2016. Les nulles s'enchaînent après que Carlsen ait manqué quelques étonnantes opportunités d'ouvrir le score jusqu'à ce que Karjakin fasse couler le sang le premier dans la huitième partie à la stupeur générale. Carlsen, excédé, sèche la conférence de presse d'après-partie mais alors que sa situation devient critique revient à hauteur dans la dixième partie après de longues manœuvres en finale de tours.
La marche en avant des nulles reprend alors son droit et le match se termine donc par une égalité, synonyme de départages en rapide. Lors de la troisième partie à cadence accélérée, Carlsen met la pression avec une forte attaque sur une Ruy Lopez et parvient enfin à prendre l'avantage. Il se montre ensuite très solide dans la dernière partie dans laquelle Karjakin, à force de prendre tous les risques, finit même par s'incliner. Grâce à ce succès dans la douleur, Carlsen défend donc sa couronne de nouveau avec succès. Chess.com a classé ce match de championnat du monde comme le neuvième plus excitant de tous les temps.
Carlsen connaît une année 2017 en dents de scie. Très tôt, il obtient deux deuxièmes places au Tata Steel et au Grenke Chess Classic, avant d'être victime d'une semaine cauchemardesque en juin au Norway Chess qu'il conclut à une piteuse neuvième place sur dix avec sa pire performance en tournoi (2670) depuis novembre 2015. Carlsen se reprend aussitôt en s'imposant en départage face à Vachier-Lagrave au Paris Grand Chess Tour, avant de réaliser un coup d'éclat dont il a le secret lors de l'étape suivante à Leuven.
Avec un score cumulé de 25,5 points en rapide et blitz, il écrase la concurrence. La clé de sa domination vient de sa performance en blitz (14,5/18), qualifiée de phénoménale par Kasparov. La performance élo de Carlsen dans la portion de blitz s'élève ainsi à 3018. Selon le chroniqueur du Guardian, Leonard Barden, "seule l'écrasante victoire de Bobby Fischer au mondial de blitz de 1970 peut rivaliser avec la démonstration du norvégien".
Quelques apparitions décevantes plus tard (dans la Sinquefield Cup et la Coupe du Monde 2017), Carlsen met fin à une disette de victoire dans un tournoi classique de 435 jours en domptant les nombreux participants de l'Open d'Isle of Man de Chess.com en octobre. Avec 7,5/9 points, il devance Anand et Nakamura d'un demi-point.
En décembre, Carlsen finit troisième du London Chess Classic, performance suffisante pour s'adjuger le Grand Chess Tour 2017 en raison de ses succès dans les étapes parisienne et belge de la tournée. L'année de Carlsen se clôt comme souvent par les Championnats du Monde de rapides et blitz. En difficulté dans sa première spécialité, il doit se contenter de la cinquième place après un départ raté. Il reconquiert cependant son titre en blitz une ronde avant la fin devant ses concurrents Karjakin et Anand, relégués à 1.5 point.
La première chose à régler pour Carlsen en 2018 est de réaliser le doublé au Speed Chess Championship de Chess.com (Tournoi à élimination directe sous formes de matchs en blitz et bullet). En fin d'année précédente, il n'a fait qu'une bouchée de Gadir Guseinov 20.5-5.5, a impressionné face à So 27.5-9.5 et enfin a pris le meilleur sur Grischuk 15.5-10.5. Au tout début du mois de janvier 2018, l'attend donc en finale une nouvelle fois Nakamura qu'il domine nettement 18-9.
Carlsen va alors enchaîner les performances de haut vol jusqu'à son match de Championnat du Monde en novembre et décembre. Il remporte notamment une sixième victoire - record - à Wijk aan Zee (Tata Steel), s'impose au Championnat du Monde non-officiel de Fischer Random, termine second du Grenke Chess Classic, s'impose au Shamkir Chess, partage la deuxième place du festival de Bienne et finit 1er ex-equo de la Sinquefield Cup.
En novembre, Caruana défie donc Carlsen pour sa couronne dans un combat qui s'annonce alléchant mais la montagne accouche d'une souris avec douze nulles en autant de parties. Carlsen est d'ailleurs vivement critiqué pour avoir proposé nulle à son adversaire dans leur dernière partie classique alors que sa position est prometteuse. Il justifiera plus tard sa stratégie par sa confiance à dominer son rival en rapide. Les faits donnent raison à Carlsen puisqu'il inflige un cinglant 3 à 0 à l'américain, dont la solidité s'est effritée avec le raccourcissement de la cadence. C'est la troisième fois que Magnus Carlsen défend son titre de champion du monde avec succès.
Décembre marque comme toujours les Championnats du Monde de rapides et blitz; et comme l'année précédente, Carlsen échoue dans le premier et s'impose dans le second. Il finit cinquième ex-equo du rapide et triomphe, invincible en blitz avec 17 points sur 21.
Carlsen débute 2019 avec - pour changer - des résultats impressionnants. Il porte à sept le nombre de ses titres à Wijk aan Zee et domine nettement le Mémorial Gashimov avec deux points d'avance sur ses poursuivants, marge inédite depuis 4 ans et demi, sa performance à 2988 explique le pourquoi du comment.
D'autres victoires suivent, y compris le Grenke Chess Classic, les rapides et blitz de Côte d'Ivoire, le tournoi de Lindores Abbey Chess Stars, le Norway Chess et le Croatia Grand Chess Tour. Cet ultime succès est synonyme pour Carlsen de huitième victoire consécutive dans un événement de top niveau, grâce à une qualité de jeu sans égal, le numéro un mondial retrouve logiquement son meilleur classement officiel en août 2019, le stratosphérique 2882 !
Présent et futur
Carlsen poursuit sa domination sur la scène internationale. Dès qu'il prend part à un tournoi , on s'attend à sa victoire et c'est rare qu'il déçoive ses supporteurs. Ses performances et records, aussi bien en classiques qu'en rapides et blitz sont si nombreux que l'on ne sait plus quoi attendre d'une légende vivante de notre jeu qui n'a pas encore fêté ses 30 ans.
Carlsen continue pourtant d'inventer des réponses au fur et à mesure. Au moment de la publication, en octobre 2019, il est en train de réaliser un nouvel exploit - une série de 101 parties classiques sans défaite. La question est de savoir jusqu'où le champion du monde va porter ce record.
En effet, le plus extraordinaire chez Carlsen est qu'il a accompli tant de choses en si peu de temps et qu'il semble toujours prêt pour de nouveaux exploits. A quoi pourraient-ils ressembler ? Peut-être un nouveau record de longévité en tant que champion du monde, toujours plus de titres mondiaux en rapide et blitz, des peut-être futurs succès dans des variantes émergentes comme le Fischer Random, des victoires en rafale dans les tournois de l'élite comme à Wijk aan Zee ou en Norvège, un règne interminable de numéro un mondial. Pourquoi ne pas rêver franchir la barre des 2900 ? Quoi qu'il en soit, le monde entier n'attend qu'une chose, être le témoin privilégié des prochains chefs d'oeuvre de Magnus Carlsen.
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